LA
TRISTESSE ET L'ESPOIR
Je
suis allé au meeting de lancement de la campagne pour les
législatives du Parti Socialiste pour la région « Occitanie –
Midi Méditerranée-Pays Catalan », qui représente 5,7
millions d'habitants et 13 départements. Ça se passait à Capendu
(si, si, ça existe et sans la pluie, c'est très sympa). Je suis
venu en voiture de Toulouse (aller-retour 250 km), n'étant pas
informé des cars éventuellement prévus. Nous étions à peine un
millier : les vieux militants qui venaient défendre
l'engagement de toute une vie, et quelques jeunes catalans, avec
leurs drapeaux venus en cars de Perpignan. Mille pour presque six
millions : Un pour 5.700 habitants, un pour 4.000 électeurs :
Merci d'être venus si nombreux comme a dit Cazeneuve, sans doute par
dérision.
Carole
Delga, présidente de région, présente au Zenith de Toulouse au
meeting de Hamon, a fait un très bon discours, disant que la gauche
ne devait pas oublier ses valeurs de progrès social, fustigeant les
girouettes qui se tournaient du côté du vent macroniste, et
défendant implicitement une alliance avec la "gauche de la gauche",
disant que le progrès n'était pas dans le camp de Macron.
Puis
Cazeneuve est intervenu, et là j'ai été consterné : Il est sensé
être l'animateur des campagnes législatives du PS, et a défendu la
«gauche de gouvernement» fustigeant ceux qui avaient refusé de
s'aligner lors des votes sur la loi travail et la déchéance de
nationalité. Le petit doigt sur la couture du pantalon, c'est ce
qu'il aurait exigé des députés dits « frondeurs » :
Les Godillots à la de Gaulle, c'est ce qu'il aurait voulu. Il a
reproché au candidat socialiste (Hamon, qu'il n'a jamais nommé) de
ne pas avoir assez défendu le bilan de Hollande. Si le bilan de ce
gouvernement était si bon, pourquoi n'a-t-on pas entendu les ténors
de la gauche le défendre, et pourquoi le premier qui aurait du le
défendre, l'ex Président de la République, n'a-t-il pas osé se
présenter devant les Français ? Pourquoi les électeurs de la
primaire ont-t-ils sanctionné le représentant du gouvernement
(Valls) avec cette sévérité ? L'heure de la « gauche de
gouvernement » est passée, le désastre est consommé, place à
la gauche de reconstruction innovante et sociale.
La
salle qui avait applaudi chaleureusement au discours de gauche de
Carole Delga est restée étrangement silencieuse lors des allusions
perfides de Cazeneuve contre Hamon, et aux éléments de son discours
de « gauche de gouvernement » (SIC ! ). Les vieux
caciques du PS n'ont donc rien compris à ce qui arrivait : Le
centre schizophrène droite-gauche a attiré les rose-pales, et le
PS a abandonné sa place à gauche, qui a aussitôt été prise par
la FI. Il n'est resté au PS que l'espoir d'une reconstruction, par
les soutiens de Hamon, dans une perspective de renouvellement des
représentants du PS.
Cette
« gauche de gouvernement » si c'est celle de Valls et de
Macron (et leur marionnette El Khomeri), je n'en veux pas, jamais
plus. Je ne veux pas d'une gauche de trahison qui renie 250 ans de
luttes sociales pour faire plaisir au Medef. Surtout quand on voit
les résultats obtenus par ces mesures horriblement chères (35
milliards d'euros, la moitié du déficit budgétaire !) et
totalement inefficaces, sauf peut-être pour des PME qui ont pu, sur
notre dos, renforcer leur trésorerie et embaucher quelques dizaines
de milliers de salariés au prix effarant de 800 000 euros par emploi
…
Cazeneuve
a demandé de façon très ambiguë de ne pas laisser le président de
la république seul … (qui ? Hollande ou son clone Macron?) et
que la gauche le soutienne :
« Et
"c'est parce que je veux le meilleur pour le Président de la
République que je n'entends pas le laisser seul avec ceux qui
prétendent le cerner totalement" ..."Pour le faire
réussir, il faut lui donner une gauche de gouvernement, responsable,
pragmatique, convaincue, attachée à ses convictions, soucieuse de
l'intérêt général, pour ne pas le laisser seul avec ceux dont on
connaît la politique parce que nous l'avons éprouvée" à
qui ? à Hollande le destructeur du PS, à Macron le libéral ?
NON,
NON ET NON la gauche de gouvernement que j'aime, c'est celle qui
a créé les congés payés, 1, 4, puis 5 semaines, c'est la gauche
de la sécu, la gauche des 39 heures puis des 35 heures par semaine, la gauche du RMI (devenu RSA par appropriation de la droite), la
gauche de la CMU, et c'est bien sur aussi la gauche du mariage pour tous
(merci Madame Taubira). C'est celle qui mettra un jour en œuvre
le RUE sous une forme ou une autre. Mais ce n'est pas celle de
Valls ni de Macron, ce libéralisme prétendument social qui est
avant tout économiquement libéral, adepte de la casse sociale et de
la soumission de la société à l'économie capitaliste dérégulée,
à laquelle semble appartenir Cazeneuve.
J'étais
présent aux meetings de Hamon à Toulouse, celui des primaires, et celui du
Zénith de Bercy, et j'ai entendu Hamon plaider pour les réelles
avancées sociétales des gouvernements Hollande, mais dire qu'il
s'était opposé (en cela je lui suis reconnaissant) aux trahisons
des valeurs de la gauche, la déchéance de nationalité, et surtout
« l'inversion des normes » qui permet aux accords locaux
de supplanter le droit du travail, aberration dans le droit Français
dans lequel tout accord privé doit être subordonné à la loi
s'appliquant à tous. Cette loi ignoble qui met le salarié à la
merci de son employeur, qui pourra exiger tout de lui, avec à la clé
comme chantage la fermeture de l'entreprise pour délocalisation. Il
me vient les mots d'Aragon « A quoi peut leur servir de se
lever matin, eux qu'on retrouve au soir désarmés, incertains ... »
Cette loi désarme les salariés, et lorsque Macron aura facilité le
licenciement et rendu illusoire le recours aux prud'hommes, il ne
restera rien de ces luttes sociales. Faudra-il recommencer les trois
glorieuses, 1848, la Commune, les grandes grèves des années 50, la
révolte de 68, les manif anti CPE, etc ? C'est la seule issue
donnée.
J'étais
donc présent aux meetings de Hamon, et l'enthousiasme qu'il y avait,
la jeunesse mobilisée, l'espoir soulevé n'avait rien à voir avec
la grande tristesse poussiéreuse qui accompagnait le discours de
Cazeneuve, sans doute bon ministre de l'intérieur, très discret
premier ministre par intérim, mais rétrograde et refusant la gauche
inventive.
J'ai
bien fait d'aller à ce meeting, même si j'ai fait pour cela 250 km
et que j'ai payé 20 euros d'autoroute, car je sais maintenant avec
certitude qu'il fait partie de la gauche dont je ne veux pas, du PS
moribond, alors que j'aspire à un PS qui retrouve ses valeurs de
combat, celles de Jaurès, celles de Blum. Cette gauche, nous la
reconstruirons, dès aujourd'hui, avec le renouvellement ses valeurs
fondamentales : protections des plus faibles, progrès social et
redistribution des richesses créées par les 60 millions de Français
et captées par un petit nombre.
Eddy Moidonc ,
Le 19 mai 2017
crédit photos : Facebook @Carole Delga / Belga / Le Figaro
Merci.
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