lundi 3 juillet 2017

Loi travail, droit à la casse, MEDEF ravi!



Au printemps 2015, le MEDEF avait fait sa liste de cadeaux au père Noël, le voilà en passe d'être exaucé par Jupiter!
La patience est toujours récompensée.

En mai 2017, Pierre Gattaz s'est dit "sur un nuage", en raison du "sans faute" de Macron... Ce qui n'est pas rassurant pour le commun des mortels.




La promesse électorale du Messie, de réformer le code du travail, était bien vague... Elle n'a pas inquiété grand monde comparée à l'affichage clair de casse sociale sans précédent annoncée par Fillon... Le fameux "vote utile" a souvent été "tout plutôt que Fillon et Le Pen". Macron et son projet nébuleux paraissaient presque rassurants... On a même salué, ici et là, la volonté de procéder à un nécessaire "toilettage" d'un code du travail français trop touffu et compliqué, "frein à l'embauche" disait-on...

Qu'en est-il en ouvrant les yeux?

La méthode


Sur la réforme du code du travail, le gouvernement Macron veut aller vite. C'était aussi le projet de Fillon, qui avait inquiété par sa volonté de tout faire passer pendant les vacances...
C'est pratique: ça évite les manifs.
Nous y voilà. On se demande toujours si Macron est vraiment ni de droite ni de gauche? Vraiment?

Pour aller vite, le gouvernement va procéder par ordonnances.
Pour pouvoir procéder par ordonnances, il va falloir faire voter au Parlement la loi d'habilitation. Cette loi qui est un projet partiel de la réforme du code du travail a été présentée le mercredi 28 juin en Conseil des Ministres et sera votée au Parlement fin juillet.

En résumé, le Parlement vote la loi d'habilitation, et ce faisant autorise le gouvernement à prendre des ordonnances ensuite pour mettre en place l'intégralité de la nouvelle "loi travail".

Cette loi d'habilitation, autorisant le gouvernement à gouverner par ordonnance sur la loi travail, sera votée par un Parlement dont l'immense majorité est "en marche", en aveugle, et a signé pour dire toujours "oui" au patron pendant les 5 ans qui viennent, ça va être du billard.
On peut donc considérer dès maintenant que les projets présentés ne rencontrerons aucune opposition autre que la rue...
Les lois passeront sans faire l'objet de débats au Parlement.
Des concertations fantoches et rapides auront lieu pendant l'été avec les syndicats, sachant qu'il s'agit plus pour le gouvernement de présenter son projet que d'entendre les revendications des "partenaires sociaux" qui seront juste là pour écouter la "bonne parole".

Il faudra attendre les ordonnances prises en Conseil des ministres pour connaître le détail de la réforme du code du travail.
Le Parlement ratifiera ensuite à posteriori les ordonnances.

Le projet


Le projet de Macron est axé autour de la "flexibilité" en entreprise: possibilité de déroger aux accords de branche, fusion des instances représentatives du personnel, plafond obligatoire des dommages et intérêts pour licenciement abusif... On voit assez vite à qui profitera le crime. Tout pouvoir aux entreprises, réduction drastique de la protection et des droits des salariés.

Mais plus précisément:

L'accord d'entreprise primera sur l'accord de branche

Les salaires, le temps de travail, le taux des heures supplémentaires pourront être négociés dans chaque entreprise. Actuellement l'accord de branche prime sur l'accord d'entreprise, ce qui est plus sécurisant. Le patron pourra facilement "faire pression" sur les salariés pour qu'ils acceptent localement un accord qui leur est défavorable.C'est ce qui s'appelle "l'inversion de la hiérarchie des normes"

Limitation des indemnités prud'homales

Un barême serait rendu obligatoire aux prud'hommes pour encadrer les dommages et intérêts lors de licenciements irréguliers. Les planchers et plafonds s'appliqueraient dans les décisions des juges, sauf en cas de licenciement "résultant d'une discrimination ou de faits de harcèlement".

Faciliter les licenciements et les rendre moins chers

Aujourd'hui lorsqu'un groupe international licencie en France alors qu'il se porte bien au niveau mondial, les syndicats peuvent faire valoir ces bonnes performances pour remettre en cause les licenciements ou demander des dommages et intérêts plus élevés. Le projet de loi consisterait à modifier le "zonage" des licenciements économiques afin que seule la France soit prise en compte. Ainsi, si la filiale française déficitaire d'un groupe étranger par ailleurs en pleine forme décide de licencier, elle pourra se prévaloir de licenciements économiques. Les multinationales pourraient ainsi créér des difficultés économiques artificielles en France pour pouvoir y licencier facilement.

Les délais de recours contentieux réduits

Aujourd'hui un salarié remercié peut contester son licenciement pendant 2 ans. Le projet de loi prévoit de réduire ce délai.

Extension du travail dominical

Autorisé par la loi Macron de 2015 aux zones touristiques commerciales pour 2 ans, le projet de loi veut prolonger cette autorisation et "faciliter le circuit d'abrogation des arrêtés préfectoraux de fermeture", donc faciliter l'ouverture le dimanche pour tous les commerces...

Créer un nouveau contrat à mi-chemin entre CDI et CDD: le CDI de projet

Favoriser le recours à des contrats conclus pour la durée d'un chantier (existe déjà dans le bâtiment). Sans date de fin précise (contrairement au CDD) ce contrat permet à l'employeur d'ajuster la durée effective du contrat aux besoins du chantier ou du projet et de s'adapter aux éventuels contretemps. Cela lui évite de recourir à des CDD, plus rigides et qui donnent lieu à des indemnités de précarité. Un salarié en contrat de projet aurait toutefois droit à des indemnités. L'employeur peut licencier le salarié lorsque le projet pour lequel il a été embauché est terminé (il doit justifier d'être dans l'incapacité de le conserver: sureffectif, non-qualification...).

Simplifier le compte pénibilité

Fonctionnant avec un système de points, il permet actuellement de partir à la retraite plus tôt ou de travailler à temps partiel en cas de travail pénible. Le projet de loi prévoit de simplifier les obligations de déclaration des employeurs des facteurs de risque (demande du patronat).

Consultation directe des salariés pour valider un accord d'entreprise

Actuellement les syndicats sont les interlocuteurs de la Direction. Le texte prévoit de faciliter le recours direct à une consultation des salariés sans passer par les syndicats pour valider un accord d'entreprise (risque de "pressions" de la direction sur les salariés pour faire passer un accord défavorable). cela permettrait de "contourner" les syndicats.

Fusion des instances représentatives des personnels

Réduction de l'influence des syndicats par la fusion de diverses instances (CHSCT,  comité d'entreprise, délégués du personnel). Cette instance aurait des compétences en matière de négociation à la place des syndicats.

Voilà pour le tour d'horizon de ce projet de loi qui va clairement dans le sens d'une réduction du pouvoir des syndicats, des défenseurs des droits des salariés, une flexibilisation et une précarisation du marché du travail.

On vous disait bien qu'il ne nous avait pas tout dit avant les élections...

Sources:
http://www.francetvinfo.fr/economie/emploi/carriere/vie-professionnelle/droit-du-travail/les-dix-pistes-du-gouvernement-pour-reformer-le-code-du-travail_2259129.html

http://www.ouest-france.fr/politique/gouvernement/code-du-travail-les-huit-points-capitaux-de-la-reforme-5096031

http://www.lci.fr/politique/code-du-travail-que-contient-la-loi-d-habilitation-presentee-au-conseil-des-ministres-2056931.html

http://www.lci.fr/politique/reforme-code-du-travail-cdi-projet-qu-est-ce-que-ce-contrat-que-concocte-le-gouvernement-2056617.html

http://www.huffingtonpost.fr/2017/06/28/quest-ce-quun-projet-de-loi-dhabilitation-et-que-contient-sur_a_23005554/

2 commentaires:

  1. merci Anne de cette utile synthèse, et de rappeler que la hiérarchie des normes, c'est la notion tres simple que les accords d'entreprise ne peuvent être moins favorables aux salariés que les accords de branche, eux memes soumis au code du travail, et ce dernier à la loi. L'inversion de cette hiérarchie au nom de la compétitivité signifie à la fin l'alignement de la législation sociale sur celle du BenglaDesh. C'est comme si l'esclavage, qui est prohibé par la loi, pouvait être autorisé par arrêté municipal ou comme si le code pénal ne s'appliquait pas à Levallois-Perret (ah, oui, c'est déjà le cas ?)
    Ces lois vont être adoptées sans débat parlementaire ni débat public. C'est un coup de force contre la démocratie.

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  2. Oui Aristide, un déni de démocratie pour faire passer la casse des droits des travailleurs... Navrant et inquiétant...

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