mercredi 21 juin 2017

Robotique, travail et progrès social

Publié pour le compte de Edmond Harlé

Merci à Philippe Geluck pour cet emprunt

Alors que les études américaines et françaises montrent que la robotique aux USA produit à la fois du chômage, une baisse des salaires et une crise sociale dans la région d'implantation des robots, cela se produit car la robotisation ne s'est pas accompagnée de progrès social avec notamment une réduction de la durée du travail.

Pourtant, il y a des irresponsables qui disent qu’il faut « travailler plus » alors que la vraie question est comment partager le travail qui va subsister ou apparaître, et inventer de nouveaux emplois sans porter atteinte à la qualité et au niveau de vie des salariés et retraités ?

Les humanistes savent que les humains sont capables de s’adapter à de nouvelles situations et de profiter des changements pour améliorer leur condition de vie terrestre. Ils refusent le catastrophisme. L’histoire permet d’apporter un éclairage et d’imaginer des ripostes aux changements.

Le progrès social : une réponse indispensable.



Du début de l’ère industrielle aux années 1980 la multiplication de la productivité du travail avait été compensée par 3 données complémentaires :
  • La hausse de la population donc de la demande et de la production (absurdité de la politique de l’offre en période d’augmentation de la productivité du travail, de stabilité démographique avec vieillissement et de chômage donc de surcapacité de production)
  • L’augmentation de la rémunération du travail complétée par la protection sociale et les allocations familiales et donc, ici aussi, une augmentation de la demande et de la consommation.
  • La réduction de la durée du travail (de 80 heures à 35 heures hebdomadaires en France, congés payés, abaissement de l’âge de la retraite, prolongation de la scolarité…)


A l’exception des 35 heures françaises, qui hélas n’ont pas été imitées par les autres pays industrialisés, depuis les années 1980, sous le double effet du néolibéralisme (idéologie gestionnaire) et de la disparition de la peur du communisme, on a assisté à :
  • une réduction de la part de la rémunération du travail dans le PNB et à une hausse de la rémunération du capital, source de graves injustices, de la multiplication des inégalités mais aussi du fort taux de chômage. En effet, les revenus du travail sont consommés pour plus de 95% tandis que ceux du capital spéculent sur les marchés financiers, financent un peu d'investissements et surtout ne consomment pas. La capacité de consommer n’a pas suivi la courbe de la productivité du travail
  • l’abandon de la réduction de la durée du travail, et même, avec l’augmentation du travail féminin et des modifications législatives (recul de l’âge de la retraite, durée hebdomadaire en hausse,…), elle a augmenté en même temps que la productivité du travail réduisant ainsi le nombre de travailleurs
  • la remise en cause des prérogatives étatiques, la forte réduction de la fiscalité sur les entreprises et les plus riches, et la quasi disparition des droits de douane ont réduit l’investissement public qui était une source importante de la croissance économique et donc de l’emploi.


Le premier moyen immédiatement efficace serait de renouer avec le progrès social. Les politiques de régression sociale contribuent à augmenter le chômage et non à la résoudre.

Le second moyen, pour générer des investissements publics, est une hausse mondiale de la fiscalité sur la finance, les grosses fortunes et sur les sociétés (voir Piketty : Le capital au XXIème siècle).
Même très efficaces ces deux moyens ne permettront pas, à eux seuls, de faire face à la révolution robotique. Il faut envisager et inventer une nouvelle ère économique dans l’histoire de l’humanité.

La nécessaire invention d’une nouvelle ère économique.

Chaque fois que la productivité du travail a été multipliée dans une activité humaine, une autre activité a permis de compenser en partie la perte de travail.


Aujourd’hui, il faut imaginer une nouvelle ère, celle de la robotique ou de la « commotique », avec 3 données à inventer ou mettre en œuvre :
  • Découpler rémunération et protection sociale du travail en inventant la rémunération de l’utilité sociale et en créant un droit imprescriptible à un revenu minimum garanti par la puissance publique
  • Inventer de nouveaux emplois autour de la robotique, des services à la personne, de la culture et du bien vivre ensemble.
  • Prendre la dimension de l’innovation connexe qu’est l’impression 3D : demain, une part importante des produits que nous achetons pourront être conçus par nous (en fonction de nos besoins et de nos goûts personnels) à partir d’un programme informatique et fabriqué chez nous ou près de chez nous.

Il y a là un mouvement possible de relocalisation de la production et aussi d’éparpillement de la production en de petites unités. Il faut anticiper cette révolution qui peut être favorable à l’emploi et à la protection de l’environnement, la principale source de destruction de l’environnement étant le découplage entre localisation de l’énergie et des matières premières, lieux de consommation et zones de production.

Tout est à imaginer et une mobilisation générale est nécessaire et urgente si l’on ne veut pas donner partiellement raison à Marx et Lénine, en tissant la corde de la disparation du travail humain pour se pendre, mais sans connaître le « paradis socialiste ».

Pour cela il faut proposer une alternative face à l’idéologie gestionnaire planquée derrière les notions de « réalisme économique », « d’expertise », de pragmatisme », de « réforme » même. Ce vocabulaire a pour seul but d’interdire d’imaginer un autre système économique, une autre conception philosophique, sociologique, politique, économique et sociale pour le vivre ensemble, et réaliser enfin le bien commun au lieu d'asservir l’humain au profit des multinationales.


Oui, le progrès social est possible. Oui, il est la seule réponse possible à la crise politique, économique, sociale et morale que traverse l’Europe. Les peuples de France et d’Europe, fidèles à leur histoire, ne doivent pas être dupes des objectifs de l’idéologie gestionnaire qui n’est qu’au service d’une très petite minorité de possédants.

Toutes les politiques européennes actuelles ne visent pas à réduire le chômage, elles l’aggravent. Elles visent à instaurer une autre répartition des fruits de l’activité économique entre le capital et le travail. Pour cela une telle politique a déjà obtenu, en France, avec le pacte dit de responsabilité un transfert de plus de 40 milliards d’euros du travail et de la solidarité sociale vers le capital, ce qui est unique dans l’histoire de notre pays, sans aucun effet sur l’emploi et la croissance.

Elle tente aujourd’hui, avec la volonté de réformer le code du travail, de supprimer le seul moyen de réduire les conséquences de l’inégalité au contrat de travail. C’est pour limiter les effets de cette inégalité au contrat que la morale sociale chrétienne et la subsidiarité exigent des lois nationales et internationales pour encadrer strictement ces contrats.


Or, aujourd’hui , avec le chômage de masse, la nécessité de travailler à n’importe quel prix pour beaucoup de chômeurs, la peur de perdre son emploi pour ceux qui en ont un, la domination de l’idéologie gestionnaire dans tous les médias, mêmes publics, jamais depuis un siècle l’inégalité n’a été aussi forte.

Dans ce contexte, réduire le Code du Travail signifie en fait de livrer les salariés au bon vouloir de leur patron. S’attaquer aux conventions collectives est un complément logique de cette politique scandaleuse.

Dans l’entreprise, aujourd’hui, le plus souvent le dialogue social se réduirait à contraindre les salariés à accepter le dictat de leur employeur et à subir la régression sociale : travailler plus pour gagner moins, détruire la vie familiale et sociale par le travail dominical ou nocturne, réduire les salaires en-dessous des salaires conventionnels ….


Dans ces conditions, sans une mobilisation idéologique et concrète de tous ceux qui croient au progrès social, la robotique sera un nouvel outil pour accroitre les inégalités, le chômage et les profits pour une minorité. Il faut inventer un nouveau contrat social, agir en concertation étroite avec tous les partenaires syndicaux, associatifs et politiques, qui, au-delà des divergences et des différences idéologiques et historiques, veulent aujourd’hui le progrès social et ne croient plus au grand soir et à la révolution. Alors la robotique sera un plus pour l’humanité.

Associer robotique et régression sociale avec Macron est dramatique.

Il faut associer robotique et progrès social pour mieux vivre avec un vrai progrès social et humain.

1 commentaire:

  1. très bonne analyse, mais le problème c'est que les forces qui croit au progrès social, ne sont plus assez importantes, plus assez mobilisées, pour faire contrepoids...et dans ce domaine, les socialises vendus à Macron, les FI qui refusent toute alliance,et le monde nationaliste des Lepennistes, créé des clivages; qui augmente le désenchantement des électeurs, accentuant l’abstention là ou il faudrait au contraire une participation amplifiée...Comment dans un tel contexte arriver à mobiliser le peuple afin d'améliorer sa vie ? c'est là toute la question !

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